Alexandra Bertaud supervise pour Europol un vaste coup de filet dans le milieu pédopornographique. Après l’opération, elle est appelée sur une nouvelle scène de crime. Le corps d’un homme sauvagement torturé vient d’être retrouvé. C’est le pitch de Sentence – Les Amazones, le premier roman policier de Patricia Nandes publié par les Editions Reines De Coeur. Extrait de la rencontre publiée dans le numéro d’octobre de Jeanne Magazine.

Vos précédents ouvrages étaient plutôt sur un versant comique et décalé, pourquoi avoir opté pour la noirceur avec ce polar  ? Passez-moi l’expression, mais il fallait que ça sorte ! J’ai longtemps tourné autour du pot avant de transformer ma propre histoire en fiction. Et puis c’était quelque part plus facile d’interpréter un rôle plutôt que d’étaler les faits sordides que j’ai dû traverser. Une amie m’a dit un jour, alors que j’avais laissé tomber la rédaction de ma bio, (qui n’aurait de toute façon intéressé personne !) de transformer mon histoire en polar puisque j’avais suffisamment de matière pour créer une fiction. L’idée a fait son chemin, puis je me suis mise à écrire Sentence. Je tiens à préciser que je n’ai tué personne  !

Pouvez-vous nous présenter les deux héroïnes de votre roman, Alex Bertaud et Laura Livi  ? Alex est une obsessionnelle, névrosée, monomaniaque. Elle est flic, bosse à Europol dans le service pédopornographie. Mais elle n’est pas seule car en réalité son personnage est triple puisqu’elle souffre d’un syndrome de personnalités multiples. C’est une femme très compliquée, avec un côté masculin exacerbé. En fait, cette partie-là s’appelle Bertaud, la femme c’est Alex, toujours prête à tomber amoureuse de la première venue  ! Alexandra, c’est la petite fille qui n’a pas grandi et qui n’a pas réussi à surmonter les traumatismes du passé. Laura Livi est une femme superlative, solaire, sexy, délurée dans sa vie privée autant que dans son job de flic. Être flic et lesbienne dans une ville comme Naples est déjà un défi en soi, croyez-moi sur parole  ! J’adore Laura et je tomberais facilement amoureuse d’elle si l’occasion s’en présentait  !

Votre ouvrage se passe dans trois pays, la Suède, l’Italie et la France. C’était important pour vous qu’il soit international  ? La France et l’Italie s’imposaient parce que je suis italienne de père et de mère mais française avant tout. La Suède, c’était une façon d’externaliser le traumatisme. Comme un juge va demander son dessaisissement pour une autre juridiction afin que le procès soit plus serein. Et puis trois pays créent du mouvement, des décalages culturels, des latences dans l’enquête. J’aimerais bien aller en Suède, alors j’ai choisi ce pays plutôt qu’un autre  !

Vous parlez de pédopornographie, de viols sur des enfants et de meurtres, le pire dont l’être humain est capable, non ? Le pire, je ne sais pas. Pour moi, ça l’a été. J’ai vécu tous les traumatismes possibles et inimaginables qu’engendrent le viol et la maltraitance. Subir ces horreurs, petite fille, c’est un coup de griffe qui ne cicatrise jamais vraiment. Sentence a été une catharsis, autant pour mes personnages que pour moi. Lorsqu’on se frotte à l’horreur, on s’aperçoit qu’elle n’a pas de limites, c’est pour cette raison que l’expression «  le pire  » ne veut plus rien dire dans certaines situations. (…)

La fin du récit apparaît comme une bouffée d’air frais, malgré tout ce qu’ils ont vécu, vos personnages aspirent à retrouver une certaine quiétude. Pensez-vous que ce soit facilement accessible après avoir côtoyé l’horreur ? Dire que survivre à des horreurs est facile, ça non, je ne m’y risquerais pas  ! Je fais encore des cauchemars très réalistes à 60 ans passés. Le bonheur est une orchidée délicate, trop d’eau ou pas assez et la voilà en train de dépérir. Mais pour reprendre une technique de «  psy  », il faut savoir construire son propre pont avec le futur. Je suis ici et je veux arriver là-bas, comment je m’y prends  ?

Si les lecteurs ne devaient retenir qu’un message de votre roman, lequel aimeriez-vous que ce soit  ? La lutte. Encore et toujours la lutte. Résister, s’affirmer en tant que femmes, affirmer sa sexualité, et se battre sans jamais céder un pouce de terrain. (…)

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Sentence de Patricia Nandes (Editions Reines de Coeur)

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