Catherine, Faina, Jo et Mami sont membres des Lesbiennes Dépassent les Frontières, un réseau qui vient en aide aux lesbiennes réfugiées et demandeuses d’asile. Extrait de la rencontre publiée dans le numéro de février de Jeanne Magazine.

Pouvez-vous nous parler de vous et des membres fondatrices ? Notre réseau de solidarité avec les lesbiennes réfugiées et demandeuses d’asile a été créé il y a 6 ans à Paris par quatre lesbiennes féministes militantes : deux exilées/réfugiées nées et ayant vécu auparavant en Afrique du Nord et en ex-URSS, et deux nées en France. A l’époque, nous nous connaissions depuis une dizaine d’années déjà, venant du mouvement lesbien (anarcho)-féministe avec une expérience de soutien collectif aux lesbiennes sans-papiers. Depuis le début, la création du réseau Les Lesbiennes Dépassent les Frontières a été largement portée et encouragée par des nombreuses lesbiennes militantes, ainsi que par des associations lesbiennes et féministes (Coordination Lesbienne en France, la Maison des Femmes de Paris, Cineffable, les Dégommeuses, Bagdam Espace Lesbien, etc.).

Pouvez-vous revenir sur les constats qui vous ont motivées à créer ce réseau de solidarité Les lesbiennes dépassent les frontières ? Deux constats ont conduit à la création du réseau fin 2011 : Tout d’abord, les cercles amicaux ne pouvaient plus supporter seuls la demande de soutien grandissante des lesbiennes arrivant en France pour se réfugier en tant que lesbiennes. Ensuite, les associations parisiennes de soutien aux personnes LGBTI réfugiées ou demandeuses d’asile s’adressent à un public très majoritairement gay (les lesbiennes rencontrées au moment de la création du réseau n’y étaient pas très à l’aise en tant que femmes et en tant que lesbiennes). Il nous fallait inventer une structure pour mieux s’organiser, et ce de manière plus pérenne. Il est très important pour des lesbiennes d’être accueillies par d’autres lesbiennes, réfugiées ou pas, loin de regards et de discours sexistes et lesbophobes. Aujourd’hui, nous sommes 270 lesbiennes impliquées de loin ou de près, dont plus de 160 lesbiennes réfugiées.

Comment cela se passe-t-il concrètement pour aider et soutenir les lesbiennes réfugiées et demandeuses d’asile ? Au sein de notre réseau, les lesbiennes demandeuses d’asile, les lesbiennes réfugiées qui ne demandent pas l’asile, les lesbiennes réfugiées ayant obtenu l’asile et celles qui n’ont jamais eu à se réfugier se rencontrent et apprennent à se soutenir mutuellement. Notre permanence du 3è samedi de chaque mois à 15h30 à la Maison des Femmes de Paris est le moment convivial où beaucoup de lesbiennes du réseau se retrouvent afin de discuter de la vie du réseau et des urgences, et aussi pour accueillir les nouvelles. Il y a une réelle nécessité de rompre l’isolement dont souffrent beaucoup de lesbiennes réfugiées, et les démarches liées au processus de la demande d’asile sont complexes, parfois vécues comme difficiles, voire humiliantes. L’accompagnement par celles qui sont passées par là est donc essentiel. Un tiers des lesbiennes réfugiées de notre réseau sont anglophones, ne parlant pas du tout français, ce qui rend les démarches encore plus difficiles. Par conséquence, toute la communication au sein de notre réseau est bilingue français/anglais. Des copines qui parlent anglais accompagnent celles qui ne parlent pas français dans les démarches administratives ou liées aux questions de santé. Depuis sa création, notre réseau est financé uniquement par des dons de lesbiennes et de femmes individuelles, ainsi que par des associations lesbiennes et féministes. Cet argent est utilisé pour améliorer l’autonomie des lesbiennes réfugiées (cartes sim, transport, billets de train pour celles qui habitent loin de la région parisienne et qui souhaitent nous rencontrer, solutions d’hébergement, etc.), mais aussi pour payer des consultations auprès des psychologues lesbiennes de confiance parlant plusieurs langues. La préparation des dossiers de demande d’asile, liée aux étapes parcourues (OFPRA, CNDA, procédure Dublin) demande beaucoup de temps et d’investissement et s’avère cruciale pour celles qui choisissent de demander l’asile en France.

Par quel biais arrivez-vous à entrer en contact avec elles pour les soutenir/aider dans ces épreuves difficiles ? Le bouche à oreille fonctionne très bien. Les copines réfugiées qui connaissent le réseau accompagnent celles qui viennent juste d’arriver. Au fil du temps, nous sommes devenues plus connues des intervenantes sociales des centres d’accueil partout en France. Comme nous sommes habilitées par l’OFPRA à accompagner les demandeuses d’asile à l’entretien, nos coordonnées se trouvent sur leur site. Les lesbiennes réfugiées sont hébergées partout en France, et les associations lesbiennes et LGBTIQ sur Paris et dans d’autres régions font le lien entre elles et nous.

De quels pays viennent les femmes que vous aidez ? Algérie, Arménie, Burkina Faso, Cameroun, Congo Brazzaville, Côte d’Ivoire, Géorgie, Guinée, Iran, Kenya, Mali, Maroc, Mauritanie, Nigéria, Russie, Sénégal, Sierra Leone, Tanzanie, Tunisie, Uganda, etc. Les lesbiennes réfugiées fuient car elles ne peuvent pas vivre leurs histoires d’amour avec leurs compagnes en toute liberté. Elles fuient les viols dits correctifs, les mariages forcés, les violences physiques et psychiques inouïes, souvent de la part de leurs propres familles. Elles choisissent l’exil pour ne plus être condamnées à passer leur vie entière à se cacher. Certaines parviennent à s’échapper après avoir été emprisonnées et torturées.

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Retrouvez l’interview en intégralité dans le numéro de février de Jeanne MagazineN’oubliez pas qu’en vous abonnant à Jeanne, vous permettez à votre magazine 100% lesbien de continuer à vous proposer plus que 80 pages de contenu exclusif chaque mois !