Kyrian Malone a créé Homoromance Editions à Montréal en 2015. Pour Jeanne Magazine, elle revient sur le parcours de sa maison d’édition, sur le renouveau de l’édition lesbienne et sur ses nouveaux projets : la Journée mondiale du Livre lesbien qui aura lieu le 29 juin et le petit salon du livre lesbien qui se tiendra à Paris le 6 juillet. Extrait de la rencontre publiée dans le numéro de février de Jeanne Magazine.

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? J’ai eu un parcours scolaire et professionnel chaotique que je peux résumer en quelques mots : Syndrome d’Asperger, conflits avec la hiérarchie, manque de filtre, ennui dans les tâches répétitives, besoin de créativité et démissions… J’ai enchainé les petits boulots en France, en Irlande, et j’ai quitté l’Europe en 2012 pour partir vivre au Québec et entièrement me consacrer à l’écriture et à mes romans publiés sur ma vitrine steditions.com. Après avoir écrit ou co-écrit plus de 100 livres sous mon nom d’auteure et d’autres pseudonymes, en 2015 j’ai créé Homoromance Editions à Montréal pour offrir une nouvelle vitrine aux auteurs francophones.

Comment vous est venue l’idée de créer Homoromance Editions ? L’envie de créer une plateforme pour d’autres auteurs me trottait dans la tête depuis plusieurs années. Ma coauteure et moi étions des hyperactives de l’écriture et j’ai eu besoin de m’investir pour d’autres auteurs. J’avais le réseau, les finances, l’essence artistique et commerciale, il me manquait la structure : l’aspect gestion et comptabilité que ma compagne a complété pour m’encourager à lancer Homoromance Editions. (…)

Combien de romans avez-vous édités et quels sont ceux qui vous ont marqués depuis la création de votre maison d’édition ? Je ne m’occupe pas des chiffres, mais je dirais une centaine d’œuvres, avec les quelques romans gay ou trans que compte notre catalogue. Pour les titres qui ont marqué notre équipe, il y a incontestablement Les enfants d’Héloïse la suite de Les amis d’Héloïse d’Hélène de Monferrand qui a valu à l’auteure le prix Goncourt du premier roman en 1990. Pouvoir publier cette suite a été un honneur et surtout un plaisir quand on connaît la plume talentueuse de l’auteure. Plus récemment, l’auteure guyanaise Netty N’Zila a su émouvoir notre comité par la puissance de sa plume à travers quatre nouvelles bouleversantes, des romances qui mettent en avant l’amour lesbien dans des pays et époques inattendus comme le Rwanda, la Louisiane ou encore l’Inde. Je vous dirais que tous les titres acceptés par notre comité de lecture nous ont touchés. Ils ont chacun leur âme, leur essence propre. Ils sont le reflet d’expériences, de vécus, de rêveries ou de fantasmes de nos auteurs. Chacun d’eux est marquant et unique… (…)

Comment envisagez-vous les prochaines années d’Homoromance Editions ? En termes de publication : notre planning est déjà plein jusqu’au mois de juin. À raison de deux à trois manuscrits reçus par jour, nous allons devoir augmenter le nombre de publications hebdomadaires, ce qui signifie agrandir notre équipe, notre catalogue et de fait, notre visibilité. L’homoromance, qu’il s’agisse de romances FxF (Femme/Femme) ou de MxM (Male/Male) a de belles années devant elle ! Le genre se démocratise, davantage d’auteurs osent sortir leur manuscrit du placard… Ils comprennent qu’ils ne sont plus seuls ou isolés, qu’il existe un véritable mouvement d’accès à la littérature Queer. (…)

Parlez-nous de La Journée mondiale du Livre lesbien, qui aura lieu le 29 juin… (…) Nous devons nous demander : quelle place ont les auteures de romances lesbiennes dans la société ? Qui en parle ? Les auteurs vous le diront : personne. Personne ne nous met en avant donc nous n’existons pas aux yeux du public. Les lecteurs s’imaginent que les livres saphiques n’existent pas, pire encore, nous apprenons par les médias représentant notre propre communauté que les Maisons d’édition LGBT mettent toutes la clef sous la porte. C’est une erreur que nous devons rectifier et cela passe par la mise en place de stratégies destinée à nous rendre plus visibles. Il y a plusieurs mois, créer cette journée s’est présenté comme une évidence, à la fois comme une décision militante (puisque je suis auteure du genre), et aussi comme un moyen de sensibiliser le public à l’existence de livres mettant en exergue l’amour entre femmes lesbiennes. C’est un enjeu important pour notre visibilité quand on sait que des femmes francophones, dans plusieurs pays d’Afrique, n’ont pas légalement accès à un simple livre d’amour lesbien. N’oublions pas que l’homosexualité est encore punie de la peine de mort et que ces livres sont un vecteur puissant qui aide aussi les femmes seules ou en souffrance à sortir de leur isolement psychologique. Certains demanderont : pourquoi créer une journée dédiée au livre lesbien et non pas une journée du livre Queer ou LGBT+ ? C’est encore un choix militant. (…)

Vous allez aussi lancer le petit salon du livre lesbien qui se tiendra à Paris le 6 juillet au Bar Ouf… Suite à l’annulation du Salon organisé par le Centre LGBT, nous voulions offrir une alternative simple et temporaire à nos auteures. Rencontrer le public est un des plus beaux moments pour un auteur, voir, sentir l’émotion quand un lecteur a lu et compris le message qu’on souhaite faire passer, ça n’a pas de prix. Ce petit salon se veut ponctuel et humble et n’est pas comparable au travail fourni par les bénévoles du Centre LGBT de Paris. Nos auteures seront en signature à leur table de 14h à 19h et prendront un verre en compagnie des lectrices dans la soirée. Ce sera une occasion unique de découvrir une vraie littérature accessible et variée, et de faire le plein de livres que l’on ne trouve pas dans les réseaux de vente traditionnels. Ces événements de rencontre sont des moments de bonheur et d’échanges de belles énergies. (…)

homoromance-editions.com

Retrouvez cette rencontre en intégralité dans le numéro de février de Jeanne MagazineEn vous abonnant à Jeanne, vous permettez à votre magazine 100% lesbien de continuer à vous proposer 90 pages de contenu exclusif chaque mois !