Agir pour changer les représentations des femmes dans la société grâce à la culture, c’est la principale mission des Aliennes, une association qui est née du désir de ses membres de mener des actions artistiques, culturelles et éducatives pour promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes. Pour en savoir plus sur l’association, Jeanne a posé quelques questions à Tatyana Razafindrakoto, sa présidente, qui prépare actuellement la prochaine édition du festival Les Aliennes qui aura lieu les 25 et 26 mai. Extrait de la rencontre publiée dans le numéro de mai de Jeanne Magazine.

Pouvez-vous nous parler de vous et de l’équipe qui chapeaute Les Aliennes ? Je suis Tatyana Razafindrakoto, comédienne et metteuse en scène. J’ai eu l’idée du festival Les Aliennes en 2015, après avoir travaillé avec le Collectif La Formule, un collectif d’artistes pluridisciplinaires, sur l’émancipation des femmes, notamment des autrices, via un projet appelé Les Émancipées – mises au génie. Pour mettre en scène ce projet, j’ai énormément lu, j’ai découvert le travail d’écrivaines, d’historiennes, de poétesses, d’essayistes, que je ne connaissais pas. Ça a été un électrochoc. D’abord, parce que j’étais émue de découvrir tout d’un coup la richesse, la diversité et la puissance de ces femmes artistes et intellectuelles. Je pouvais enfin m’identifier à des créatrices alors que j’avais passé ma scolarité et mes études théâtrales à travailler à partir de textes d’hommes. J’ai pris conscience de leur invisibilisation, de l’oubli volontaire dans lequel on les a plongées, des difficultés qui se dressent depuis toujours devant les femmes qui créent, les femmes qui font, les femmes qui pensent. J’ai mis le doigts dans une prise et ça a allumé dans mon esprit une lumière qui ne s’est pas éteinte depuis et, même, qui ne cesse de grandir. Avec cette prise de conscience est venu le féminisme assumé, l’envie d’agir pour les droits des femmes, pour notre visibilité et la diversité de nos représentations. L’idée d’un festival multiculturel, pour mettre en avant les femmes artistes et aborder les différents sujets liées aux droits des femmes, est arrivé tout naturellement. Je gravite dans le milieu artistique, les moyens que j’ai à ma disposition sont souvent culturels. Et j’ai toujours pensé que l’art, l’art engagé, était un merveilleux levier pour changer le monde ou, du moins, pour allumer quelques étincelles dans les esprits et faire évoluer les mentalités. Je pilote le festival depuis et je suis également la présidente de l’association, que nous avons fondée en octobre 2016 avec les bénévoles du premier festival Les Aliennes, qui a eu lieu en mars 2016. Aujourd’hui, nous sommes toujours une équipe entièrement bénévole et les membres actives de l’association sont toutes des femmes. On aime se présenter comme optimistes et infatigables, deux « qualités » absolument nécessaires quand on monte des projets de grande ampleur, comme le festival, avec très peu de moyens, avec nos vies professionnelles à gérer par ailleurs et avec les nombreux freins que rencontrent les projets féministes. Avec l’impression aussi, parfois, que quoiqu’on fasse, rien ne change ou qu’on ne sera plus là pour voir les changements que nos actions d’aujourd’hui contribuent peut-être à impulser. C’est là qu’on puise dans notre optimisme, dans notre énergie, pour continuer. Il faut croire que la société peut évoluer, sinon on pourrait, nous aussi, rester paralysées… (…)

Comment qualifieriez-vous le festival en quelques mots ? Pour qualifier le festival en quelques mots, je dirais que c’est un événement festif et féministe qui met en avant les femmes artistes et les créatrices tout en s’interrogeant sur des sujets de société. Notre ligne directrice, c’est un peu cela aussi. Mettre en avant les œuvres et les engagements des femmes pour les rendre accessibles au grand public.

Pouvez-vous nous en dire plus l’édition 2018 qui aura lieu les 25 et 26 mai prochain ? Cette année, nous nous sommes intéressées à la place des femmes dans le numérique et les nouvelles technologies. Le festival s’intitule d’ailleurs le festival Les Aliennes 3.0 #CallToAction et se déroulera au Hasard Ludique, dans le 18è arrondissement, à Paris. Le digital est un secteur en pleine expansion, très dynamique, qui recrute beaucoup. C’est aussi un secteur récent dans lequel on pourrait s’attendre à ne pas retrouver les vieilles inégalités et discriminations de la « vie réelle ». Et malheureusement, le numérique n’a pas échappé au sexisme. Seulement 11% des étudiant·e·s des écoles d’informatique sont des femmes, 9% des développeur·euse·s d’applications mobiles sont des femmes et seules 10% des startups sont créées par des femmes. Quant aux artistes dans les musiques électroniques, là encore, une écrasante majorité d’hommes. Internet et les réseaux sociaux sont aussi des espaces qui peuvent être dangereux ou toxiques pour les femmes, à cause du cyberharcèlement notamment. Bref, il nous a semblé qu’il était temps de mettre notre grain de sel dans le numérique ! Donc on a conçu un festival qui remet en question cette absence des femmes dans le numérique. Notre programmation musicale est très majoritairement composée de femmes artistes, avec des projets électro et des DJ Sets. En journée, il y aura des tables rondes et des conférences, organisée par Deuxième Page, un webzine culturel, ou encore le RESET, un hackerspace féministe, mais aussi des ateliers de codes menées par des étudiantes de la Webacadémie, un atelier à faire en famille de créations de « voiture-robots » avec l’association Les Petits Débrouillards… Un petit marché de créatrices, des animations, des stands d’infos ainsi qu’une permanence juridique pour répondre aux questions de cyberharcèlement et de violences sexistes en général, tenue par les avocates du Conseil de l’Ordre du Barreau des Hauts de Seine. Bref, c’est un évènement à la fois festif et militant, ouvert à tous·tes, kids friendly et majoritairement gratuit.

(…)

www.lesaliennes.org

Retrouvez la rencontre avec Tatyana Razafindrakoto en intégralité dans le numéro de mai de Jeanne MagazineN’oubliez pas qu’en vous abonnant à Jeanne, vous permettez à votre magazine 100% lesbien de continuer à vous proposer plus que 80 pages de contenu exclusif chaque mois !