Pour lutter efficacement contre les LGBTphobies, l’école est une étape stratégique. Pourtant, les gouvernements successifs ne prennent que peu d’initiatives contre ces discriminations en milieu scolaire. Comment l’expliquer ? Extrait de l’article publié dans le numéro d’octobre de Jeanne Magazine.

Faites une expérience. Écoutez une bande de collégiens discuter entre eux et comptez le nombre de fois où le mot « pédé » sera employé. L’insulte reste la grande favorite des cour de récréation, parfois sans même que les élèves comprennent vraiment de quoi il s’agit. Que le milieu scolaire et plus particulièrement les années collège-lycée soient propices au développement des LGBTphobies n’est plus à prouver. Sans parler de nos expériences adolescentes parfois douloureuses, les chiffres publiés chaque année par SOS Homophobie le confirment. Dans son rapport de 2016 constitué à partir de témoignages (ligne d’écoute, chat, email), l’association relevait ainsi que 69 % des victimes de LGBTphobies ont moins de 18 ans, et que 66 % des agresseur.e.s sont des élèves du même établissement que la victime. Conséquence ? Un taux de suicide nettement plus haut chez les jeunes LGBT que les autres. Deux à sept fois plus élevé exactement selon un rapport commandé en 2013 par le Ministère de l’Éducation Nationale. Sans aller jusque là, être quotidiennement moqué, insulté, frappé parfois pour son orientation sexuelle ou son identité de genre réelle ou supposée ne fait pas du bien. Stress, isolement, décrochage scolaire sont le lot des jeunes qui subissent ces discriminations.

« On essaye au maximum de les laisser débattre entre eux »

« L’école est un monde particulièrement dur, il y a beaucoup de cas de harcèlement en règle générale », note Gaëlle Perrin, responsable des interventions en milieu scolaire Île-de-France pour SOS Homophobie. Quand on lui demande comment elle l’explique, elle prend le temps de remuer le thé dans sa tasse en faisant une petite grimace. La question à deux milliards… « Je dirais que les jeunes sont en formation de leur identité et que ça passe aussi par se situer « contre » les autres. La violence est une stratégie d’affirmation de soi. Et puis c’est un sujet très personnel, qui touche à l’intime. Les jeunes sont mal informés là-dessus, pleins d’idées reçues. » Et Gaëlle sait de quoi elle parle. Adhérente de SOS Homophobie depuis 2015, elle a commencé à intervenir régulièrement dans les collèges et lycées franciliens depuis un an et demi environ. Toujours en classe entière, pendant deux heures sur le temps des cours, et menées par deux intervenant.e.s, ces interventions sont l’un des points centraux de l’action de l’association. « Ce n’est pas un cour magistral où on leur apprend ce qu’ils doivent penser », insiste Gaëlle, « On s’assoit en cercle, on lance la discussion et on essaye au maximum de les laisser débattre entre eux… C’est comme ça qu’on peut arriver à déconstruire les préjugés sur l’expression de genre ou l’orientation sexuelle. » Si les réactions des élèves sont négatives, les intervenant.e.s tentent de rapprocher d’eux la question en leur demandant par exemple comment ils réagiraient si un.e ami.e leur faisait son coming-out. « J’ai déjà eu des réponses assez violentes du type « Bin ce serait plus mon pote » ou « Je lui parle plus », voire « Je le frappe ». Mais il ne faut pas s’arrêter à ça, c’est une réaction épidermique d’un.e ado qui ne s’est jamais posé cette question. Ça ne dit rien de ce qu’il ou elle ferait vraiment. »

Un manque d’études chiffrées

Autre structure à agir dans ce domaine : le Collectif éducation contre les LGBTphobies en milieu scolaire. Formé en 2004 après une table ronde sur l’éducation au Printemps des associations, le collectif rassemble 9 organisations et syndicats de personnel éducatif mais aussi de collégiens, lycéens et parents d’élèves. L’action de la structure se divise en trois volets : protéger les élèves victimes de LGBTphobies, défendre les collègues qui rencontrent ces discriminations, et former le personnel éducatif à ces questions. « C’est quelque chose qu’on fait en interne, dans les organisations syndicales et ce dès l’école primaire », explique Cécile Ropiteaux, coordinatrice du collectif.

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Par Mathilde Bouquerel

Retrouvez l’article en intégralité dans le numéro d’octobre de Jeanne MagazineEn vous abonnant à Jeanne, vous permettez à votre magazine 100% lesbien de continuer à vous proposer 90 pages de contenu exclusif chaque mois !