« Je me suis dit qu’il fallait de toute urgence que je travaille à la sauvegarde de la  mémoire des lesbiennes », mission accomplie pour Paula Dumont, à qui l’on doit déjà Mauvais Genre, parcours d’une homosexuelle, La Vie dure, éducation sentimentale d’une lesbienne ou encore Lettre à une amie hétéro, propos sur l’homophobie ordinaire. Aujourd’hui l’autrice vient de sortir Entre femmes, un ouvrage qui recense 300 oeuvres qui mettent au premier plan l’amour d’une femme pour une autre. Extraits de l’interview publiée dans le numéro de mai de Jeanne Magazine.

D’où vous est venue l’idée de ce nouvel ouvrage ? Il y a environ deux ans, lors d’une conversation, j’ai remarqué que deux amies très cultivées (et de ma génération) ignoraient l’existence l’une d’Olivia (roman et film) et la seconde de Carol de Patricia Highsmith. Je me suis dit qu’il fallait de toute urgence que je travaille à la sauvegarde de la  mémoire des lesbiennes. Dans un premier temps, j’ai pensé recenser une cinquantaine d’ouvrages essentiels pour les résumer et les commenter. J’aurai 70 ans l’année prochaine et comme je ne suis pas éternelle, je ne voudrais pas que tous ces livres se perdent. Etant une prof de lettres retraitée, c’est un travail qui est dans mes capacités et qui me plaît. C’est donc ma manière de militer.

Quelles sont les premières autrices à qui vous avez pensé avant de débuter votre livre ? Les premières autrices, ce sont les grandes, les plus talentueuses, celles qu’il n’est pas permis d’ignorer, Colette bien sûr, l’écrivaine la plus célèbre du monde, qui m’a accompagnée toute ma vie (à 21 ans j’ai fait ma maîtrise sur elle, à 55 ans, j’ai soutenu une thèse sur Colette et la Grande Guerre, époque totalement ignorée jusque-là par les critiques de Colette) et que chacune et chacun gagne à lire et à relire ; Virginia Woolf que je regrette de ne pas pouvoir apprécier dans le texte anglais, étant d’une nullité crasse en langues étrangères, Patricia Highsmith, Françoise Mallet-Joris, Dorothy Bussy, qui se cache derrière le pseudonyme d’Olivia, et Marguerite Radclyffe Hall.

Carol de Patricia Highsmith a été adapté pour le cinéma par Todd Haynes et sortira sur nos écrans à la rentrée prochaine. Que diriez-vous à celles qui vont aller voir le film sans avoir lu le livre ? Je leur dirais qu’elles se privent d’un grand plaisir : Patricia Highsmith est une immense romancière, tous ses romans sont à lire, même ceux qui ne traitent pas du lesbianisme. Carol est un vrai thriller, très bien construit, qui tient en haleine jusqu’à la dernière page. Mais je ne suis pas de l’avis de celles et ceux qui affirment que ce roman finit bien. Certes personne ne se suicide à la fin du livre, mais le fait que le père de la fillette de l’une des deux amantes arrive à l’arracher à sa mère est véritablement tragique. Je le dis d’ailleurs nettement quand je commente Carol dans Entre Femmes.

Si vous deviez ne choisir que cinq romans parmi les 300, quel serait votre choix ?
1) Le pur et l’impur de Colette
2) Orlando de Virginia Woolf
3) Olivia par Olivia
4) Le rempart des béguines de Françoise Mallet-Jooris
5) Le puits de solitude de Marguerite Radclyffe Hall
6) Carol de Patricia Highsmith.
Vous ne m’avez demandé que cinq titres, mais je n’arrive pas à choisir entre les deux derniers.

Entre Femmes, 300 œuvres lesbiennes résumées et commentées, de Paula Dumont (L’Harmattan).

Retrouvez l’interview de Paula Dumont en intégralité dans le numéro de mai de Jeanne Magazine : n’oubliez pas qu’en soutenant Jeanne, vous permettez à votre magazine 100% lesbien de continuer à vous proposer 90 pages de contenu exclusif chaque mois !